« L'heure sonne. Laisse fuir la barque et l'onde ! Ne laisse pas fuir l'amour. L'onde, la nuée et l'heure, tout passe, et nous pleurons tous ! »
« L'heure sonne. Laisse fuir la barque et l'onde ! Ne laisse pas fuir l'amour. L'onde, la nuée et l'heure, tout passe, et nous pleurons tous ! »
Les avirons mis à nu.
Journal d’un triple portrait
Notes de Jean Seban sur le film « Danube, Prélude pour trois visages et deux frères ». 2008-2014, 27min. Paru dans la Revue Geste N°6, automne 2009.
Ralentir à chaque instant la construction du tableau afin que la mort ne s’en empare pas. Un tableau jamais fini pour résister à la fin qui rôde, car si « finir un tableau c’est l’achever », c’est aussi réserver le même sort au modèle.
Cependant ralentir n’est pas forcement gagner sur la mort ; le chaos suscité par le ralentissement, s’il éloigne une représentation tout à la fois du destin et de l’anecdote, supprime de lenteur en lenteur la vie même.
Alors voilà l’histoire du film :
un homme devait faire un film, un portrait sur des hommes en canoë
mais déjà il était inquiet de partir, de se noyer. Il lui fallait avant tout ralentir l’année,
ralentir l’année afin de ne pas trancher entre les étoiles du fleuve et la porcelaine clignotante du lavabo.
décider finalement de partir, ne plus s’arrêter
la vitesse invente l’histoire du fleuve disaient‐ils.
Alors cela sera l’histoire d’un film, un film en canoë fait avec les cadavres des rameurs.
Ramer avec l’espoir qu’ils ralentissent, pour les voir vivants aussi. Un portrait pour sauver l’homme des cataractes.
Un film goutte à goutte qui tamiserait le temps.
Ralentir le fleuve goutte à goutte...
Mais dans le film il y a un clavecin dont le noir sonne blanc et lorsqu’ils ralentirent, ils étaient déjà morts.
Il ne restait plus qu’à laisser glisser le fleuve sans rien prononcer, tandis que sous l’eau parmi les os,
on voyait la vie :
Faire un portrait c’est peindre la vie, une vie fragile qui contient en sa splendeur la mécanique de sa chute ; faire un portrait c’est peindre quelqu’un en train de mourir.
Faire un portrait c’est aussi savoir que le tableau qui raconte cette vie pourra exister après la disparition de celle‐ci, savoir que cette représentation, témoignage infime d’une vie, prendra plus tard la place de la vie. Conçu dans l’arrogance d’un éclair, le portrait ne sera bien souvent contemplé que dans son vivotement anecdotique.
Au rebours, le portrait charitable, le film qui ne condamnerait pas à mort le sujet durant sa propre vie, pourrait être celui qui ne cesserait de ralentir, dont chaque couche de couleurs remettrait en question la précédente, un tableau qui s’autodétruirait au fur et à mesure qu’il se peint et se regarde afin de ne pas mettre en danger la vie qu’il se propose de peindre.
Danube, prélude pour trois visages et deux frères
Un film
Paru dans la Revue Geste N°6,
automne 2009, p147
Ouverture du film
Portraits
2008-2014, 27min (extraits)
déchiffrage
films
Flagrant délit de
Projections du film et des esquisses
Danube, prélude pour trois visages et deux frères
Espace Jemmapes
20 janvier 2008, 116 Quai de Jemmapes, Paris
Maison d’arrêt des femmes,
6 janvier 2012, allée des Thuyas, Fresnes
Juin 2015, 10 Paschima Nagari Kothrud Pune – 411052 Maharashtra, India
Articles, publications, entretiens
3 janvier 2016
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